Si Montréal vibre particulièrement durant la saison estivale, sa scène musicale indépendante ne connaît pas de répit en hiver. Un festival au creux de l’hiver, mais pour quoi faire ? Eh bien… pour y voir plus clair, justement. Réparti entre l’avenue du Mont-Royal, la rue Saint-Denis et le boulevard Saint-Laurent, le Taverne Tour continue de sortir des sentiers battus. Pour sa 9ᵉ édition, il revient avec une mission claire : nous remettre en forme pour la rentrée musicale.
Véritable vitrine des sorties à venir, le festival célèbre la diversité des genres musicaux vivants, issus de l’underground d’ici et d’ailleurs. Avec son QG installé au Ministère, l’équipe exécutive (si vous cherchez les cerveaux derrière cette opération, sachez qu’ils sont tous vêtus de noir) met en lumière la richesse de la scène alternative et le potentiel de projets en marge. Le tout rappelle le rôle essentiel de la création artistique, tant individuel que collectif : remettre en question les normes socio-politiques, reconstruire son identité ou en créer une nouvelle, illuminer les zones d’ombre, renouer avec sa créativité, sortir de sa zone de confort, tisser de nouveaux liens sociaux et insuffler un sentiment de solidarité au-delà des cadres socio-économiques du quotidien.
Ce parcours du combattant, au cœur du Plateau-Mont-Royal, offre un terrain fertile pour des rencontres inattendues. C’est la tournée des bars, tout simplement.
“Music is life and life is not a business.” Iggy Pop
Parcours alternatif / indie / folk
Avec une vingtaine d’artistes dans ses rangs, l’armada indie/alternatif saura toucher les âmes sensibles et rêveuses. Celles qui, guitare en main - acoustique ou électrique -, portent sur le cœur des histoires à raconter, sont en quête d’une liberté artistique à défendre et d’une sincérité à préserver.
En tête d’affiche, le trio post-punk venu de Louisville Wombo, mené par la bassiste et chanteuse Sydney Chadwick, s’est imposé depuis la sortie de l’album Fairy Dust en 2022. Ambitieux, angulaire et parfois abrasif, leur son évoque à la fois le post-punk de Dry Cleaning ou de Cola, tout en portant une mélancolie poétique qui rappelle le groupe indie Daughter. Avec une perspective mature sur les relations humaines et la coexistence sous un même toit, leur musique capture l’étrangeté et l’intangible dans notre environnement immédiat. L’authenticité désarmante et la naïveté touchante de leur clip Below the House sauront vous convaincre.
Le groupe jouera le 6 février à la Sala Rossa, en compagnie des riot grrrl Poolgirl et du projet post-punk Ribbon Skirt. Dirigé par la musicienne anishinaabe Tashiina Buswa, leur premier album, attendu cet année et produit par Scott 'Monty' Munro (Preoccupations) et Marlaena Moore, explore des thèmes profonds tels que la mémoire, le deuil, et le lien de Buswa avec son identité indigène et ses pratiques culturelles. Toujours à la Sala Rossa, le concert du 8 février séduira les amoureux de l’écriture avec la torontoise Charlotte Cornfield, le projet indie rock Prewn et Ada Lea, chanteuse figurant sur la longue liste du prix Polaris en 2022, qui dévoilera son prochain album. Pour ceux qui préfèrent les guitares électriques, direction l’Escogriffe, où se produiront les projets lo-fi grunge Douance et alt-rock Knitting, sélectionné cette année dans la programmation officielle du festival SXSW.
“Quand je pleure, je suis content.” Ces petits mots, inscrits sur des stickers disséminés dans tout le quartier du Plateau Mont-Royal, intriguaient depuis des semaines. Le mystère est enfin levé : il s’agit du titre du premier album de Velours Velours, projet folk-alternatif porté par le musicien Raphaël Pépin-Tanguay. Récipiendaire du prix de la SOCAN en 2022 et désigné artiste à surveiller par Radio-Canada en 2023, Velours Velours dévoilera ce premier opus en indépendant le 7 février aux 33 Tours. Le concert, gratuit et programmé pour 19h, offre une rare chance de découvrir l’artiste dans un cadre intimiste, avant le succès qui semble l’attendre. Toujours dans la veine folk, rendez-vous au Verre Bouteille, où se succéderont la chanteuse psych-folk Paige Barlow le 6 février, l’auteure-compositrice-interprète innue Kanen le 7 février, et le projet emo-aquatique Pataugeoire le 8 février.
Parcours electro / synth / pop
Qu’il s’agisse de sonorités électroniques, de synthés ou de pop, le maître mot de cette sélection est bien la danse. Dans la pénombre, laisser son corps vibrer au rythme des pulsations devient un exorcisme moderne, une manière libératrice de conjurer ses démons. Et c’est toujours mieux lorsqu’on partage ce moment dans une foule.
En tête d’affiche de ce rituel cathartique, Kroy, alias Camille Poliquin, bien connue comme moitié du duo Milk & Bone. Derrière ses sonorités electro-pop scintillantes se cache une lumière sombre, où l’amour, la mort… et les robots sont disséqués. Si son dernier album MILITIA peut sembler accessible à première écoute, il dévoile une démarche artistique oscillant entre visions futuristes et avant-gardistes. Imaginez un vaisseau hybride naviguant entre l’univers de Grimes et celui de Poppy. Pour en témoigner, son projet ANIMACHINA est une expérience à part entière : une série de sept performances vidéo, mêlant expérimentation visuelle et création collective. À travers ce concept, Kroy donne forme à ses peurs et à sa fascination pour les machines.
Kroy se produira le 8 février à la Casa del Popolo, aux côtés de l’artiste hyperpop BéLi. Pour explorer un côté plus sombre du dancefloor, ne manquez pas la série de concerts à la Sotterenea, le 7 février. Vous y découvrirez l’EBM transgressif du duo HRT, la darkwave industrielle aux accents de chants traditionnels italiens de God’s Mom, et la dark-pop infusée de rave du projet solo Puggy Beales.